Écrit par Logan
Le mois dernier, j’ai eu la chance de participer à une retraite à l’Institut Européen du Bouddhisme Appliqué (EIAB) en Allemagne. C’est arrivé au moment où beaucoup de changements avaient lieu dans ma vie —le plus important étant peut être la façon dont je considère la sexualité.
Quelques semaines avant de venir à l’EIAB, j’étais en train de contempler le Troisième Entraînement à la Pleine Conscience en particulier. Ma relation avec cet entraînement a été spécialement tumultueuse. La sexualité a joué un grand rôle dans ma vie depuis mes dix-huit ans. Pendant le déroulement de la retraite, j’ai passé beaucoup de temps à revenir sur mes expériences de « sexe pour le sexe » et la façon dont elles avaient affecté ma vie.
J’ai fait la découverte d’un de mes schémas de comportement : dès que ma pratique de la pleine-conscience était très solide, je n’allais pas à la rencontre de gens juste pour le sexe. Dès que ma pratique de la pleine-conscience était plutôt dispersée, je faisais des rencontres de « sexe pour le sexe » et parfois, je n’avais même pas de conversation avec la personne avant de passer à l’acte : rien à voir avec « …de l’amour véritable et un engagement profond et durable connu de la famille et des proches ». J’espérais découvrir que cet entraînement était exagéré, que j’avais raison, et que tout ce « sexe pour le sexe » était très bon pour ma pratique de la pleine conscience. Pas vraiment. La vérité peut terriblement déranger les envies et les désirs.
Cela étant dit, je pense que d’autres formulations et interprétations du Troisième Entraînement à la Pleine Conscience bénéficieraient à une plus grande ouverture et au non-attachement aux points de vue concernant l’énergie sexuelle. Bien sûr, je comprends que nous ne sommes pas censés interpréter les entraînements comme un dogme ou comme une loi gravée sur le marbre. Mais les mots sont très puissants, et ils pourraient aider à apporter encore plus de vision profonde. Quand je dis « sexe pour le sexe », je me réfère au fait de rencontrer quelqu’un spécifiquement dans l’objectif d’une satisfaction sexuelle. J’admets que cela ne m’a pas toujours causé une souffrance extrême, mais le problème avec ce type de rencontre est qu’on ne comprend l’autre personne qu’à travers ses désirs sexuels. On n’en sait pas long sur ses souffrances, ses joies ou sa situation de vie.
Ceci étant, je ne crois pas que le Troisième Entraînement à la Pleine Conscience implique un engagement monogame, romantique, « d’amour pour toujours » avec son partenaire sexuel.
En tant qu’acteur qui voyage beaucoup, j’ai eu des amies avec qui j’ai eu des relations sexuelles, et nous n’étions pas engagés en tant que couple romantique ni monogame.
Cependant, ce qui rendait ces relations différentes et en accord avec ma pratique c’est que nous cultivions l’attention à l’autre et les qualités d’un amour véritable, alors qu’une relation à long terme pourrait signifier être seulement ensemble physiquement pour quelques mois. Cela ne nous empêchait pas de prendre soin l’un de l’autre au moment présent, ni à l’amour d’être là, même si nous ne jouons plus un grand rôle dans la vie l’un de l’autre.
Ces expériences m’amènent à penser que l’on pourrait formuler différemment la phrase suivante « Sachant que le désir sexuel n’est pas l’amour, et que l’activité sexuelle motivée par le désir me blesse toujours ainsi que les autres… ». Je pense que le mot « toujours » utilisé n’est pas totalement approprié. Bien que, peut-être, le désir mentionné dans cette phrase concerne un genre d’énergie spécifique différente et plus hors-de-contrôle que l’idée plus courante du désir.
Le désir est une question délicate et sujette à diverses interprétations. En biologie, le désir est ce qui propulse notre espèce vers l’avant par le désir de nourriture, d’eau, de relation et de sexe mais lorsqu’il nous contrôle, il nous conduit à une grande souffrance. Je pense que la compréhension Bouddhiste du désir se réfère souvent aux désirs intenses qui nous empêchent d’être conscients et aimants, alors qu’à l’opposé les besoins naturels nous poussent à être joyeux et en bonne santé.
Ce qui est encore plus déroutant c’est que le sexe se situe dans une zone entre ce qui ne fait pas toujours du mal, et ce qui est parfois merveilleux mais pas nécessaire à notre bonheur (d’après mon expérience, les gens les plus heureux que j’aie connus sont des nonnes et des moines). Nous sommes tous d’accord pour dire que lorsque nous avons faim il est bon de prendre de la nourriture, sachant ce qui va nourrir notre corps.
Je crois que les besoins intenses de sexe sont parfois similaires, jusqu’à un certain degré. Et un partenaire aimant et attentionné est quelqu’un à qui l’on confie nos grands désirs.
Cependant, lorsque nous ressentons un fort désir d’amour sur un plan physique, nous devrions être très conscients car ces énergies peuvent vite devenir une attirance qui nous pousse à agir à l’encontre de nos valeurs. Mais lorsque vous échangez avec quelqu’un que vous estimez profondément et en qui vous avez confiance, je ne crois pas que cela fasse forcément du tort. Je crois que les mots « blesse souvent » ou « pourrait facilement blesser » reflètent mieux ma propre conviction et certainement celle de beaucoup d’autres personnes.
Passons à la deuxième partie de cette phrase. « Je suis déterminé à ne pas m’engager dans des relations sexuelles sans amour véritable et un engagement profond à long terme connu de ma famille et de mes amis ». Comme je j’ai souligné précédemment, j’espérais que mes réflexions m’amèneraient à confirmer qu’il s’agit d’un vœu extrême ! J’avais tort. Mais mon interprétation est quand même un peu plus souple. Je dis souvent « les éléments de l’amour véritable » au lieu de dire juste « l’amour véritable » pour m’aider à me rappeler que l’amour n’est pas toujours soit complètement présent ou complètement absent. L’amour véritable est constitué d’éléments de non-amour toujours changeants.
En ce qui concerne « l’amour véritable », j’imagine que de nombreux occidentaux – les américains en particulier – le voient comme un film de Walt Disney ou une sorte d’explosion extraordinaire, exclusive et romantique, d’amour, d’attentions et de câlins. Pour moi, c’est un peu plus simple que cela. Lorsque je vois les mots amour véritable je vois les quatre éléments qui les composent : l’attention aimante, la compassion, la joie de la sympathie et l’équanimité/l’inclusivité.
Si je partage avec quelqu’un ces qualités, je sens qu’il y a un engagement naturel au bien-être de l’un envers l’autre qui est profond. A cause de cela, je ne crois pas que le romantisme ou la monogamie aient besoin d’être impliqués. Mais je pense que pour beaucoup de gens ces choses sont merveilleuses quand on les combine avec les quatre éléments de l’amour véritable. J’ai beaucoup d’amis qui ont de très belles relations dont certaines sont monogames et d’autres pas. Certains adorent l’aspect le plus romantique de leur relation, au sens traditionnel occidental du terme, et d’autres préfèrent une approche plus terre-à-terre. Quand je vois des gens s’épanouir dans une relation, le dénominateur commun est toujours la douceur aimante et la compassion que partagent les deux partenaires. Tout le reste dépend de la façon dont les individus ressentent ou expriment leur amour selon leur manière propre.
De plus, je ne pense pas que le long-terme implique que nous sommes engagés dans une relation sexuelle pour un temps indéterminé. Pour moi, cela signifie que nos cœurs vont rester ouverts l’un à l’autre même lorsque la relation sexuelle sera terminée. Nous n’allons pas nous utiliser ou nous exploiter par avidité, mais nous allons nous faire confiance avec la puissance de l’énergie de notre désir sexuel.
C’est devenu ma propre voie du milieu depuis deux mois. Interrogez-moi dans un an, je vous donnerai probablement une réponse différente. Qui sait ? Peut-être un jour me verrez-vous portant la robe marron et la tête rasée… 😉