Écrit par Soeur Sinh Nghiem
Chers Wake Uppers,
Pendant plus de trente ans, j’ai tourné en rond à la recherche de l’amour véritable et du bonheur sans grand succès. J’ai fait l’expérience de sommets d’excitation et j’ai sombré dans des abîmes de confusion et de pénombre parce que je ne savais pas comment aimer véritablement et que je ne connaissais pas l’art de se réjouir des choses simples dans la vie. Je veux partager avec vous mon voyage personnel jusqu’ici dans l’apprentissage de l’amour véritable avec l’espoir que vous pourrez en retirer quelque chose et éviter certains chagrins d’amour qui ne sont pas nécessaires et qui peuvent nous empêcher de faire l’expérience de l’amour véritable et du bonheur. Nous vivons dans une société qui est si bien équipée avec des moyens innombrables pour communiquer et se connecter les uns aux autres, mais nous n’avons toujours pas été capables de remplir ce vide intérieur ou de savoir comment gérer des sentiments de solitude et de déconnexion.
Mes expériences, à la fois celles de l’enfance et plus tard, dans mes relations intimes (en tant que laïque) ont créé beaucoup de blessures parce que je portais beaucoup de confusion en moi à propos de l’amour et de la sexualité. Enfant, j’ai été victime d’un abus de la part un adolescent plus âgé que moi qui ne savait pas comment gérer son énergie sexuelle. Dans mon esprit d’enfant naïf, la graine de confiance a été compromise à deux niveaux, relativement aux hommes et relativement à mes parents, parce que je n’ai pas su comment réconcilier les émotions fortes de colère retournée contre eux, du fait qu’ils n’avaient pas été là pour me protéger et m’embrasser.
En revenant sur mes relations d’amour passées, je peux voir que j’ai toujours essayé de rechercher ce type de compréhension et de compassion envers la petite enfant blessée en moi.
Je me suis coupée de l’amour de mes parents, et j’ai décidé que je prendrais moi-même soin de moi et que je ne compterais plus sur eux émotionnellement. Cela a aussi provoqué ma recherche à l’extérieur de moi d’un amour ressemblant à l’amour inconditionnel dont je m’étais déconnectée. En revenant sur mes relations d’amour passées, je peux voir que j’ai toujours essayé de rechercher ce type de compréhension et de compassion envers la petite enfant blessée en moi. Cet effort aboutissait toujours à l’échec parce qu’il venait de la vue fausse selon laquelle les autres pouvaient guérir cette enfant, alors qu’en fait, elle avait besoin de permettre à la guérison d’avoir lieu en se réconciliant avec ses parents et en se reconnectant au trésor de l’amour de ses parents qui avait toujours été disponible pour elle.
Dans ma famille de sang, il y avait de la souffrance ayant trait à la fidélité et à la jalousie, à la fois chez mes parents et chez mes grands-parents. En tant que leur continuation, j’ai hérité de ces graines de désir et de souffrance, que je n’ai pas reconnues et donc n’ai pas su comment transformer. Puis, grandissant dans une société où l’accent est trop mis sur la satisfaction du plaisir sensuel et sexuel (comme si c’étais le but de notre vie), je n’ai pas pu éviter de me former des vues déformés sur l’amour et le sexe. Il semble y avoir tant de « sexe vide » dans notre société, qui a très souvent laissé des sentiments de vide et de déconnexion bien que j’aie eu des relations avec des gens qui était vraiment sympas, qui avaient de l’éducation, ou même des gens qui avaient une pratique spirituelle. Au début, il y avait la nouvelle excitation et la joie d’être ensemble, mais après un certain temps, ce sentiment de déconnexion et d’inconfort physique faisait à nouveau surface.
N’étant pas consciente de mes idées erronées et de leurs conséquences, j’ai aussi appris comment utiliser l’énergie sexuelle afin de manipuler et de contrôler, croyant que cela était un droit d’exprimer ma puissance féminine dans cet âge de liberté sexuelle et de non-engagement mutuel. J’ai vécu de cette manière avec pas assez d’attention et de considération quant à la façon dont les autres pourraient se sentir. Quand je reviens sur mes relations passées, je vois que beaucoup d’entre elles se sont formées en se fondant sur une attirance qui était passagère ou alternante, et que l’attirance venait du besoin inassouvi d’aimer et/ou d’être aimée et acceptée.
Je vois que la motivation qui me poussait à être avec quelqu’un n’avait à voir qu’avec moi: ce dont j’avais besoin, ce que je voulais, ce qui répondrait à mes attentes futures pour fonder une famille; ou alors, le fait que je ne voulais pas être seule, que je voulais seulement « m’amuser » un peu, que je ne voulais pas être vue comme une « manquée », quelqu’un dont personne ne voulait, ou finir vieille fille. Si je suis honnête, je dirais que je n’ai jamais su comment véritablement aimer dans aucune de mes relations passées. Je suis désolée envers toutes ces personnes bien qui ont eu une relation avec moi! Désolée de ne pas avoir su comment prendre soin de ma propre souffrance, et donc de vous avoir fait souffert, vous aussi.
À trente ans, je pensais avoir (par un processus de selection intelligente progressive) isolé les qualités les plus importantes que je voulais chez un partenaire pour assurer un bon engagement sur le long-terme, jusqu’au jour où nous serions tous deux devenus de vieux sacs édentés assis l’un près de l’autre, nous évoquant des souvenirs de notre passé. Mais encore une fois, je me suis rendue compte que mes difficultés et ma souffrance tournaient autour de certains schémas similaires de jalousie, de possession, ou juste d’une déconnexion globale et de sentiments de vide, d’ennui, ou d’insatisfaction en moi et quant aux relations romantiques en général (comme un goût aigre après avoir mangé un dessert très sucré). Avec un taux de divorce supérieur à 50%, je n’avais pas beaucoup d’espoir d’avoir une relation heureuse et durable.
Au cours de ce processus, j’ai découvert que la première étape dans l’apprentissage de l’amour véritable est de savoir comment traiter et prendre soin de mon corps et de mon esprit avec respect et gentillesse.
Je recherchais l’intimité en un autre, mais je finissais par me sentir plus perdue et déconnectée en moi que je ne l’avais été auparavant. Ce devait être quelque chose à l’intérieur de moi qui m’empêchait d’avoir le bonheur et le sentiment de plénitude que je désirais ardemment dans les relations de couple, parce qu’indépendamment de la personne avec laquelle j’étais, j’étais toujours confrontée à des problèmes semblables. J’ai donc décidé d’arrêter de faire les choses de façon conventionnelle et j’ai pris du temps en dehors de la scène relationnelle afin de regarder profondément à l’intérieur de moi. J’ai démissionné de mon travail et j’ai réservé une retraite d’hiver de trois mois au Village des Pruniers. Après avoir fait l’expérience de la joie de la vie communautaire, de la paix et du bonheur des pratiques de pleine conscience dans la vie quotidienne, et après avoir accru ma compréhension de moi-même, l’option d’une carrière et d’un mode de vie alternatifs est devenue de plus en plus attirante. Je suis devenue moniale en étant en quête d’apprendre à aimer véritablement! (Les trompettes jouent avec vivacité!…).
Cela semble ironique de dire que je commence seulement à découvrir comment aimer véritablement maintenant que je suis devenue célibataire, mais c’est bien ce qui est en train de se passer. Je suis encore en train d’apprendre ce qu’est l’amour véritable, par ce qu’aimer véritablement est une pratique continuelle (pas seulement un sentiment) qui nous permet de faire grandir notre coeur en le rendant plus vaste et plus inclusif. Au cours de ce processus, j’ai découvert que la première étape dans l’apprentissage de l’amour véritable est de savoir comment traiter et prendre soin de mon corps et de mon esprit avec respect et gentillesse.
La première étape dans l’apprentissage de prendre soin de mon esprit est d’être consciente de mes impressions sensorielles et de la manière dont elles créent des vues erronées. Je peux à présent voir avec plus de clarté que ma souffrance est venue de vue erronées au sujet des hommes, de vues déformées sur moi-même et sur mon corps, et de vues illusoires sur le sexe, l’amour, et les relations. Grandissant entourée par une technologie d’information, je pense que mes vues erronées étaient aussi un reflet des vues de la société parce que les médias sont un des éléments les plus significatifs dans le conditionnement de mes vues au sujet des relations. Par exemple, je me souviens du film jerry Maguire et de son grand succès dans les années 1990. Dans ce film, il y avait une réplique du rôle féminin principal dans laquelle elle disait à Jerry: « Tu m’as eu à bonjour », ou « Tu me complètes ».
C’était si romantique à l’époque mais maintenant, quand je me souviens encore de ces répliques, je pense que l’héroïne recherche la souffrance, parce qu’en dépendant à un tel point de quelqu’un ou de quelque chose qui nous est extérieur pour nous compléter, en effet, nous perdons toute notre souveraineté quand il en va de notre propre bonheur et de notre propre bien-être. Il y a d’autres films innombrables dans lesquels j’ai vu qu’après seulement quelques rendez-vous, ou même après un seul rendez-vous, un couple est déjà en train de coucher ensemble! Ou sinon, il y a tant de chansons avec des paroles sur le sexe, à un tel point que le fait de ne pas coucher avec son partenaire est considéré anormal, que l’amour soit inclus dans la relation ou pas, et sans prendre le moins du monde en considération la durée depuis laquelle le couple se connaît (comprendre l’autre personne du couple semble être devenu un critère obsolète de nos jours). Le corps semble être tout comme une machine « vide » en vue du plaisir.
Sortir avec quelqu’un semble tourner exclusivement autour des impressions sensorielles et de l’attractivité, et il y a des façons sans nombre de s’embellir et d’optimiser son apparence en vue de l’effet le plus efficace (des habits, du maquillage, de la chirurgie esthétique, des régimes etc.). Nous dépensons tant de temps et d’argent, nous faisons tant d’efforts, et traversons un grand inconfort ou beaucoup de douleur pour le prix d’une beauté physique qui nous fait paraître autre que ce que nous sommes. Il n’est donc pas du tout surprenant que je me sentais rarement comfortable dans ma propre peau! Ce conditionnement commence à notre adolescence à travers les médias, notre famille, et nos compaires.
Après être devenue moniale et vivant dans un environnement libre de ses impressions sensorielles malfaisantes depuis sept ans, je suis toujours en train de travailler à guérir ces vues conditionnées de mon corps et de pratiquer jour après jour pour transformer des manières habituelles de m’associer aux autres qui ne seraient plus motivées par l’attraction et la manipulation.
J’ai grandi en consommant des images retouchées à l’ordinateur et passées au brushing d’un beauté perfectionnée— des femmes qui était grandes, minces, avec des courbes juste aux bons endroits, un teint impeccable « naturel ». Je n’ai pas pu accepté mon corps, dès l’adolescence; à certains moments, j’allais même jusqu’à le mépriser. Pourquoi est-ce que je me sentais toujours insuffisante après avoir regardé des magazines féminins des magazines de mode alors que ces lectures étaient sensées soutenir mon bien-être et mon bonheur en tant que femme? Je n’achetais pas ces magazines sur une base régulière mais partout, des panneaux d’affichages qui sont dans les rues aux centres commerciaux, en passant par la télévision et internet, on est constamment bombardé avec ces « standards » d’une image de soi cool et d’un mode de vie de consommation.
Cela entraîne beaucoup de dommages parce que cela a créé beaucoup de haine envers mon propre corps, de non-acceptance de ma situation, et de non-chance d’être heureuse dans le moment présent, parce qu’il y a toujours quelque chose à acheter pour être heureux, pour être cool. Je n’ai jamais pu être complètement confortable et vraiment me connecter avec une autre personne du fait de ce complexe au sujet de mon corps, même si l’autre personne pouvait m’accepter telle que j’étais.
Cette non-acceptation de moi-même a été si enracinée en moi que jusqu’à maintenant. Après être devenue moniale et vivant dans un environnement libre de ses impressions sensorielles malfaisantes depuis sept ans, je suis toujours en train de travailler à guérir ces vues conditionnées de mon corps et de pratiquer jour après jour pour transformer des manières habituelles de m’associer aux autres qui ne seraient plus motivées par l’attraction et la manipulation. Je suis en train d’apprendre à traiter mon corps avec respect et gentillesse en étant consciente de ce que je mange, en ayant assez de temps de sommeil et de détente, et en apprenant à gérer le stress et les émotions fortes avec la respiration en pleine conscience et la marche méditative. Le fait d’être entourée par beaucoup de nature a été très guérisseur, puisque la Terre Mère accepte tout. Qu’on soit une très belle fleur ou une feuille déformée et malade, on reste une création merveilleuse de la Terre Mère. La fleur ne compare pas et ne méprise pas la feuille, et la feuille, selon sa propre capacité, procure toujours des nutriments à la fleur et à l’arbre.
C’est seulement après m’être arrachée à mon environnement conventionnel pour faire l’expérience d’un environnement alternatif— un environnement libre de ces stimuli conventionnels— que j’ai été capable de voir plus clairement les effets de ce conditionnement sur mon comportement et mes choix quotidiens portant sur ce que je consomme pour la santé et le bien-être de mon corps et de mon esprit. La vie dans la société high tech d’aujourd’hui, c’est comme être dans une rivière qui coule à flots. On fait l’expérience exclusive d’être emporté, émergeant et se faisant immerger tour à tour de façon incontrôlable, se mettant parfois à haleter pour inspirer de l’air et n’apercevant que furtivement le bleu du ciel. Mais si on parvient à s’extraire de ce torrent et à s’asseoir sur la rive, alors, on peut voir que cette paix et cette aise sont possible, que le ciel bleu et les feuilles vertes sont si belles, que les étoiles dans la nuit sacrée sont des miracles auxquels nous appartenons tous.
Nous pouvons être plus conscients de la façon dont nos impressions sensorielles peuvent avoir un impact sur notre esprit, sur une base quotidienne, et que nous pouvons être intelligemment sélectifs de ce que nous consommons, de telle sorte que nous puissions protéger notre esprit et notre corps.
Les diététiciens disent, « On est ce que l’on mange ». Je pense qu’on peut dire la même chose de notre esprit. Ce que nous pensons et ce qui nous pousse à nous comporter comme ceci ou comme cela, y compris nos habitudes, est largement dépendant de ce que nous consommons par les impressions sensorielles qui nous laissent avec une perception de quelque chose. Si nous continuons à consommer des images, des sons, et des idées (à travers les conversations) qui fortifient ces perceptions, elles peuvent devenir une vue qui est enracinée dans notre conscience. Elles deviennent notre réalité.
Tout ce processus a lieu d’une façon très subtile si bien que nous ne sommes pas conscients de nos vues et de nos perceptions changeantes. Si notre vue est erronée ou déformée, alors, cela devient le fondement de toutes les actions qui provoquent du tort et de la souffrance. Je ne suis pas en train d’accuser les médias et la société comme responsables de ma souffrance. Ce que j’essaye de dire, c’est que nous pouvons être plus conscients de la façon dont nos impressions sensorielles peuvent avoir un impact sur notre esprit, sur une base quotidienne, et que nous pouvons être intelligemment sélectifs de ce que nous consommons, de telle sorte que nous puissions protéger notre esprit et notre corps. Comme une branche d’orchidée blanche qui deviendra violette si nous la plongeons dans de l’eau avec du colorant violet. Avec quel type de nutriment ou de couleur voulons-nous nourrir la fleur que nous sommes?
J’ai moi-même fait l’expérience de ce qu’en vivant plus simplement avec moins de stimuli sensoriels et en apprenant à nouveau à apprécier et à trouver un sens de l’émerveillement dans les choses simples de la vie, je suis en train de redéfinir mes priorités dans la bonne direction. Nous prenons souvent les choses simples pour acquises, telles que marcher seul(e) dans un coucher de soleil magnifique, se réjouir de la lumière de la lune alors qu’elle dessine des motifs merveilleux sur le sol à travers les branches et les feuilles des arbres, et savourer les couleurs délicieuses des feuilles d’automne avec nos bien aimés un dimanche après-midi.
Nos activités de tous les jours peuvent être la chose même dont notre âme a besoin quand notre esprit est uni à notre corps, quand nous sommes vraiment présents pour le moment, ancrés par notre respiration consciente. La Terre Mère nous procure tant de miracles, mais seulement si nous nous arrêtons pour recevoir et être guéris, être transformés par elle. Sinon, nous restons démunis et continuons à courir en cercles à la recherche de quelque chose quand nous avons déjà des joyaux précieux dans nos mains.
Durant nos retraites d’été au Village des Pruniers, nous avons un programme pour les adolescents. L’an dernier, en travaillant dans le programme des adolescents, j’a ressenti tant de douleur en écoutant des histoires qui disaient combien les jeunes détestent leur corps et ressentent le besoin de recouvrir ce qu’ils perçoivent comme leur laideur par des tonnes de maquillage, des histoires où on entendaient que les jeunes pensent qu’ils ou elles ne peuvent être attirant(e)s que quand ils ou elles s’habillent de façon sexy, ou n’être acceptés que s’ils consentent à avoir des relations sexuelles.
La consommation d’alcool par les mineurs, l’usage de drogues, et les rapports sexuels, sont devenons une source malheureuse de pression sociale qui touche les adolescents avant qu’ils n’aient suffisamment développé la capacité émotionnelle et mentale de gérer ce genre de choses. Quand je vois cette réalité, je comprends pourquoi les jeunes ne connaissent que la sexualité vide sans jamais toucher l’amour véritable et pourquoi ils souffrent à cause de ce niveau superficiel de bonheur. Comment pouvons-nous aider les jeunes à avoir des vues plus réalistes de la beauté, de l’amour, et de la sexualité, qui soient délicates, respectueuses et aimantes, ainsi que des vues qui peuvent nourrir et développer notre soi véritable?
Dans notre pratique quotidienne, nous avons un gatha (un court poème) à réciter chaque fois que nous nous regardons dans le miroir;
« La pleine conscience est un miroir
Reflétant les quatre éléments.
La beauté vient du coeur d’où jaillit l’amour,
La beauté vient de l’esprit qui sait être vaste ».
Quand il y a de l’amour, de la gentillesse, et de l’ouverture dans notre coeur, les gens nous trouvent naturellement attirant(e) et sont attirés vers nous sans besoin aucun de produits de beauté ou de charisme. Inversement, si nous sommes une super-modèle fameuse avec les vêtements et le maquillage les plus beaux, mais que nous regardons les autres de haut et que nous pensons tout savoir, alors, les autres ne prendront pas plaisir à être en notre présence. Cela est bien reflété dans une citation de Roald Dalh: « Si vous avez de bonnes pensées, elle brilleront sur votre visage comme des rayons de soleil, et vous aurez toujours l’air ravissant ». Le plus on peut pratiquer et voir la beauté et le fait d’être beau de cette manière, le plus on inspirera d’autres à faire de même et c’est seulement par une conscience collective que nous pouvons transformer les tendances dangereuses dans la société.
L’été dernier, j’ai participé à la Retraite Jeunes pour la Terre au Village des Pruniers et j’ai fait l’expérience d’une guérison et d’une compréhension profondes de mes relations aux hommes. Au cours des sept dernières années, j’ai été en train de travailler à guérir ma blessure de l’enfance, et je pense que j’ai accompli un bon progrès. Durant la retraite, j’ai vu un frère être ému aux larmes par un partage de Christiana Figueres. Cela m’a touché de le voir ému par la même chose qui m’émouvait. Je me suis rendue compte qu’à un niveau inconscient, j’avais ressenti une séparation immense entre les hommes et moi. J’ai réalisé que toues ces années, il y avait toujours eu une vue sous-jacente des hommes presque comme des animaux qui n’étaient intéressés ou motivés que par le sexe. Peut-être même pires que les animaux parce qu’au moins les animaux ont leur saison d’accouplement durant laquelle ils sont actifs sexuellement, alors que les humains le font tout au long de l’année et quand bon leur semble. Ce n’était pas comme si je n’avais jamais vu un homme être ému aux larmes, mais à ce moment là, quelque chose a atteint son but à l’intérieur!
Comme dans le jeu « Dragueur de mines », le clic de la souris a touché le bon carré, et un coin de mon esprit est devenu clair et spacieux, révélant la « mine » noire et épineuse des vues erronés sur les hommes qui m’avait amenée à traiter les hommes avec irrespect ou comme les objets de mes jeux d’attraction. Quand ce n’était pas le cas, je gardais une distance indifférente ou je les étiquettes comme « par-delà toute compréhension ». Après la retraite, quand j’ai eu l’occasion de parler à ce frère, il a aussi partagé avec moi que cette retraite était particulièrement importante pour lui dans son processus qui consistait à regarder en profondeur et à transformer ses défis dans sa manière de gérer l’énergie sexuelle et les relations avec les femmes.
Un autre moment inattendu de guérison pendant cette retraite est survenu quand un retraitant a partagé sur la manière dont tous les hommes avaient pratiqué le Toucher de la Terre en lien avec l’énergie sexuelle. Il y avait quelque chose dans son être qui me touchait, mais je ne pouvais pas le décrire. Peut-être qu’il était profondément ému par cette pratique, ou qu’il avait eu une vision profonde ou une transformation pendant qu’ils prenaient part aux pratiques entre hommes sans les femmes. Je me suis sentie comme guérie par sa pratique de l’humilité et par la pratique collective de nombreux hommes qui étaient aussi émus par cette puissante pratique du Toucher de la Terre. C’était comme un Nouveau Départ, une invitation à renouveler nos propres vues sur l’énergie sexuelle. C’était une confirmation puissante de l’inter-être. Quand nous pratiquons pour nous guérir nous-même, nous guérissons les autres en même temps. Quand nous nous en remettons pleinement de tout notre être à la direction de la guérison, de l’amour, de la gentillesse, et de la compassion, nous pouvons créer des ricochets qui affectent tant de personnes, et en des façons profondes et inattendues.
Je pense qu’en tant que société, nous nous faisons tant de mal les uns aux autres du fait de nos vues erronées sur le genre. Nous pensons savoir ce que veulent les hommes et les femmes, mais le savons-nous vraiment? Nous nous faisons du mal avec nos vues fausses sur le sexe, ce qui crée tant d’incompréhension sur l’amour et de la souffrance dans nos relations. Lors de la dernière session de Partage du Dharma de la retraite, j’ai partagé mes blessures passées et cette vision profonde avec mon groupe. J’ai remercié les hommes d’avoir pratiqué si bien et je me suis excusée d’avoir eu des vues fausses à leur sujet. Je n’avais pas pu voir leur spiritualité et leur sainteté. Profondément à l’intérieur de moi, je n’avais pas pu les voir comme des êtres véritablement beaux et dignes de respect et de révérence. Les larmes sont venues inonder mes yeux, emportant mes vues fausses. Je sentais que j’étais en train de guérir mes perceptions au sujet des hommes. J’ai été capable de prendre un nouveau départ pour pratiquer par rapport aux hommes d’une façon neutre et non sexualisée, et pour les voir tels qu’ils sont vraiment. En guérissant mes blessures du passé et mes vues fausses, je suis aussi en train de transformer les façons habituelles négatives dont j’entre en relation avec les hommes.
C’est formidable et si beau de pouvoir être qui qu’on est vraiment et de se lier à un autre être humain sans n’avoir rien à prétendre et sans aucun masque à porter.
Le dernier soir de la Retraite Jeunes pour la Terre, nous avons eu un Be-In avec de la musique et des spectacles, avec pour thème la protection de la Terre Mère. La soirée allait finir avec un Chant de la Terre. Je pensais que ce serait une fin lente et paisible pour cette soirée, mais alors que les membres du groupe étaient en train de se mettre en place, ils ont demandé à ceux qui s’occupaient dus système de son de monter le volume des instruments de musique et ils ont même demandé des volontaires pour danser. Presque tout le monde est descendu sur la scène et l’ont complètement recouverte. Soeur Phu Nghiem, l’une des MC, a du demander aux gens de se rasseoir parce qu’on ne pouvait plus du tout voir les musiciens. À regret, certains sont retournés s’asseoir, mais d’autres, qui ont vu que la scène, à l’arrière, était un espace ouvert, sont restés. Quand le groupe s’est mis à jouer, le rythme de swing de la chanson a remis tout le monde debout avec une envie de danser. Assez vite, tout autour de la scène, les gens évoluaient avec bonheur et liberté dans des rythmes harmonieux. Frère Phap Luu, l’autre MC, a dit « Bienvenue au Club Plum Village ».
Continuant à regarder avec contentement, j’ai ressenti que j’étais chez moi et que nous étions en train d’avoir une fête de famille. On pourrait réagir négativement et dire avec indignation: « Comment est-ce qu’une telle chose a pu se passer dans un monastère bouddhiste! ». Mais j’étais vraiment ravie parce que cette expérience était une preuve consistante pour ces jeunes qu’on pouvait s’amuser « sainement », de manière organique, sans alcool, sans drogues, et sans sexe! C’était possible parce que tout au long de la semaine, nous avions passé du temps à réfléchir et à nous comprendre et que nous avions eu du temps pour connaître peu à peu les autres dans un environnement qui favorisait la gentillesse, la compassion, et la compréhension.
Je suis en train d’en découvrir plus que jamais auparavant sur l’amour véritable en ayant l’occasion de vivre dans un environnement qui n’est pas plein de désir sexuel et de mener une vie fondée sur une consommation naturelle et saine, de la nourriture comestibles aux impressions sensorielles (sans tant de violence, de dramatisation, et d’un trop plein d’informations). Et le fait de vivre avec des gens qui sont dans le même état d’esprit et qui ont les bonnes aspirations d’aimer et d’être gentils avec tous les êtres m’aide vraiment à consolider ma pratique de l’amour véritable. C’est formidable et si beau de pouvoir être qui qu’on est vraiment et de se lier à un autre être humain sans n’avoir rien à prétendre et sans aucun masque à porter. Quand je pratique de façon à ne pas me saisir de la bonté des autres ni éviter leurs faiblesses, c’est aussi un processus parallèle à celui qui m’apprend comment gérer mes propres qualités négatives et positives. C’est quelque chose qui me rend humble et qui nourrit la vertu de la patience en moi. C’est si libérateur de pouvoir se lier avec quelqu’un avec amour et attention pour cette personne, et de seulement vouloir le meilleur pour elle, sans attente. Il est possible de faire l’expérience d’un bonheur profond, de la paix, et de la joie, en la présence de quelqu’un sans aucun contact physique.
Je veux vraiment encourager les jeunes à prendre du temps pour découvrir ce qu’est l’amour véritable, pour soi-même d’abord, avant de se précipiter dans une relation. Pour commencer, donnez-vous assez de temps pour apprendre comment comprendre et prendre soin de votre bonheur, de votre souffrance, et d’apprendre comment prendre soin de et respecter votre corps et votre esprit. Vous pouvez créer du temps pour vous asseoir en silence chaque jour pour voir ce qui est en train de se passer à l’intérieur de vous, pour vous calmer, ou pour être ouvert(e) à toutes les inspirations qui sont enfouies profondément en vous, obstruées par l’affairement quotidien et les préoccupations. Alternativement, vous pouvez passer une semaine ou plus dans une retraite dans un environnement qui peut vous aider à calmer votre corps et votre esprit, et avec des pratiques qui développent votre capacité à regarder en profondeur à l’intérieur de vous. C’est seulement alors que vous serez dans un meilleur endroit en vous pour entrer en relation avec quelqu’un d’autre d’une façon libre et aimante. Vos relations avec vous-même et avec les autres, qu’elles soient sexuelles ou non sexuelles, vous donneront un sentiment d’accomplissement, d’élévation, et elles vous inspireront.